Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/243

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Il composait en outre des livres admirables, et faisait construire une grande église dont il dirigeait lui-même les travaux. Sa correspondance incessante avec ses confrères dont il était le supérieur, ses relations assujettissantes avec la cour, tant d’occupations diverses et de sollicitudes épuisèrent promptement ses forces.


VI.


Le 3 mai 1610, le P. Matthieu Ricci fut obligé de s’aliter. Ses confrères pensant qu’il avait seulement un accès de migraine, comme il en éprouvait souvent, il leur déclara avec sang-froid qu’il était atteint mortellement. Le mal, en effet, fit de rapides progrès, et le sixième jour il se disposa à recevoir le saint viatique. Quoiqu’il fût très-affaibli et en proie à de grandes souffrances, aussitôt qu’il vit entrer dans sa chambre le saint sacrement, cet apôtre, dont la foi avait toujours été si vive et le courage si ardent, se précipita hors de son lit et se jeta à genoux pour communier ; les assistants fondaient en larmes. Après avoir reçu le pain des forts avec une tendre dévotion, il tomba dans le délire et toute la journée il s’entretint de ses chers néophytes, de la conversion des Chinois, et des espérances qu’il avait toujours nourries d’amener à Jésus-Christ l’empereur lui-même. Le lendemain il bénit ses quatre confrères agenouillés devant son lit et leur donna divers conseils pour faire prospérer la mission. L’un d’eux lui dit : « Comprenez-vous bien, mon père, en quel lieu vous nous