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LES VOIX INTÉRIEURES




I


Ce siècle est grand et fort. Un noble instinct le mène.
Partout on voit marcher l’idée en mission ;
Et le bruit du travail, plein de parole humaine,
Se mêle au bruit divin de la création.

Partout, dans les cités et dans les solitudes,
L’homme est fidèle au lait dont nous le nourrissions ;
Et dans l’informe bloc des sombres multitudes
La pensée en rêvant sculpte des nations.

L’échafaud vieilli croule, et la Grève se lave.
L’émeute se rendort. De meilleurs jours sont prêts.
Le peuple a sa colère et le volcan sa lave
Qui dévaste d’abord et qui féconde après.

Des poëtes puissants, têtes par Dieu touchées,
Nous jettent les rayons de leurs fronts inspirés.
L’art a de frais vallons où les âmes penchées
Boivent la poésie à des ruisseaux sacrés.

Pierre à pierre, en songeant aux vieilles mœurs éteintes,
Sous la société qui chancelle à tous vents,
Le penseur reconstruit ces deux colonnes saintes,
Le respect des vieillards et l’amour des enfants.

Le devoir, fils du droit, sous nos toits domestiques
Habite comme un hôte auguste et sérieux.