Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome I.djvu/296

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
Ce ne serait qu’un songe, et j’en sais de plus beaux.
Il retombe dans ses méditations.
Seul spectre qui ne soit pas sorti des tombeaux !
Je n’ai rien vu de tel durant ma longue vie.
Il se retourne vers Cromwell.
De quelle odeur sa fuite a-t-elle été suivie ?
CROMWELL, brusquement.
Que m’importe ! — Que veut dire ma vision ?

Parle. Est-ce vérité ? n’est-ce qu’illusion ?
Honneur au roi Cromwell ! — Dois-je être roi ? — Dévoile
Mon destin à mes yeux.

MANASSÉ, l’œil fixé sur le ciel.
Oui, voilà bien l’étoile !
Je la reconnaîtrais du zénith au nadir ;

Fixe, en la contemplant on croit la voir grandir,
Brillante, mais portant à son centre une tache.

CROMWELL, impatienté.
Depuis assez de temps ton œil là-haut s’attache.

Serai-je roi ?

MANASSÉ.
Mon fils, je voudrais vainement
Te flatter ; on ne peut mentir au firmament !

Je ne puis te cacher qu’en sa marche elliptique
Ton astre ne fait pas le triangle mystique
Avec l’étoile Jod et l’étoile Zaïn.

CROMWELL.
Que me fait ton triangle ? Allons, fils de Caïn,

De la tête coupée explique-moi l’oracle !
Dois-je être un jour roi ? dis !

MANASSÉ.
Non, à moins d’un miracle.

CROMWELL, mécontent et brusque.
Qu’entends-tu par miracle ?