Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome I.djvu/349

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
RICHARD CROMWELL.
Hé bien donc ! seul encor je vous fais face à tous !
Il porte la main à son côté pour y chercher son épée.
Mais quoi ! le fer vengeur manque à ma main trompée !

— Pourquoi m’as-tu, mon père, enlevé mon épée ?

CROMWELL, à part.
Pauvre Richard !
LORD ORMOND, à Richard.
Monsieur, je vous plains. Croyez-moi,
Retirez-vous. Laissez faire les gens du roi.
RICHARD CROMWELL.
Vous laisser faire, ô ciel ! Je ne veux point de grâce.

Avec lui tuez-moi sur son corps que j’embrasse !
Il se précipite sur lord Rochester endormi, et le serre étroitement dans ses bras.

CROMWELL, à part.
Mon fils ! il va trop loin ; il serait trop cruel

Qu’il se fît poignarder avec un faux Cromwell.

LORD ROSEBERRY, essayant de calmer Richard.
Richard !
RICHARD CROMWELL, toujours attaché à Rochester.
Non ! frappez-moi d’un fer impitoyable,
Ou je veux le sauver !
Les cavaliers cherchent à arracher Richard du corps de Rochester ; il lutte avec eux, et s’y cramponne avec plus de violence. — Pendant ce débat, Cromwell semble épier tous les mouvements des cavaliers et se tenir prêt à porter secours
à son fils. Manassé relève la tête, et observe attentivement sans proférer une parole.

LORD ROCHESTER, se réveillant en sursaut et se débattant à son tour.
Vous m’étranglez ! au diable !
Tous s’arrêtent comme pétrifiés.

LORD ORMOND.
Dieu ! quelle est cette voix ?
Lord Rochester arrache le mouchoir qui lui couvre le visage, et Cromwell dirige en même temps sur sa figure la clarté de la lanterne sourde.