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XXV

Je respire où tu palpites,
Tu sais ; à quoi bon, hélas !
Rester là si tu me quittes,
Et vivre si tu t’en vas ?

À quoi bon vivre, étant l’ombre
De cet ange qui s’enfuit !
À quoi bon, sous le ciel sombre,
N’être plus que de la nuit ?

Je suis la fleur des murailles
Dont avril est le seul bien.
Il suffit que tu t’en ailles
Pour qu’il ne reste plus rien.

Tu m’entoures d’auréoles ;
Te voir est mon seul souci.
Il suffit que tu t’envoles
Pour que je m’envole aussi.

Si tu pars, mon front se penche ;
Mon âme au ciel, son berceau,
Fuira, car dans ta main blanche
Tu tiens ce sauvage oiseau.

Que veux-tu que je devienne,
Si je n’entends plus ton pas ?
Est-ce ta vie ou la mienne
Qui s’en va ? Je ne sais pas.