Page:Hugo Rhin Hetzel tome 3.djvu/178

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moissonnait des ducats. Il lui suffisait de donner une signature pour faire contribuer le monde. tant que j’aurai une plume, disait Sixte-Quint, j’aurai de l’argent. Propos de pape ou de grand écrivain. En effet, Sixte-Quint, qui était un pape lettré, artiste et intelligent, n’hésitant devant aucune dépense royale, mit en cinq ans quatre millions d’or en réserve au château saint-ange. Avec les contributions de tous les fidèles de l’univers, le saint-père se donnait une bonne armée, vingt-cinq mille hommes dans la Marche et la Romagne, vingt-cinq mille hommes dans la Campagne et le Patrimoine ; la moitié aux frontières, la moitié sous Rome. Au besoin il grossissait cet armement. Grégoire VII et Alexandre III tinrent tête à des princes qui disposaient des forces de l’empire, à son apogée dans leur temps, jointes aux troupes des deux Siciles. Un jour, le duc de Ferrare se permit d’aller faire du sel à Comachio. « Le saint-père, nous citons ici deux lignes d’une lettre de Mazarin, avec ses raisons et une armée qu’il leva, amena le duc au repentir, et lui prit son état. » Voilà ce que c’était que les soldats du pape. Cette milice faisait admirablement respecter l’état romain. Ajoutez à cela l’Ombrie, grande forteresse naturelle où Annibal s’est rebroussé, et pour côtes, au nord comme au midi, les rivages les plus battus des vents de toute l’Italie. Aucune descente possible. Le pape, sur les deux mers, était gardé et défendu par la tempête.

Posé et assuré de cette façon, il coopérait au grand et perpétuel combat contre le turc. Aujourd’hui le saint-père envoie des camées au pacha d’égypte, et se promène sur le bateau à vapeur Mahmoudièh. ― Fait inouï et qui montre brusquement, quand on y réfléchit, le prodigieux changement des choses, le pape assis paisiblement dans cette invention des huguenots baptisée d’un nom turc ! ― Dans ce temps-là il remplissait vaillamment son office de pape, et envoyait ses galères mitrées d’une tiare à Lépante. Dès que les croissants et les turbans surgissaient, il n’avait plus rien à lui, ni un soldat, ni un écu ; il contribuait à son tour. Ainsi, dans l’occasion, ce que les chrétiens avaient donné au pape, le pape le rendait à la chrétienté. Dans la ligue de 1542 contre les ottomans, Paul III envoya à Charles-Quint douze mille fantassins et cinq cents chevaux.