Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/118

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l’autre bas-côté de l’église, une sainte Sabine, vierge et martyre, au col pareil à un cercle de pourpre et portant ainsi que saint Denys sa tête, une tête dont la chevelure laissait tomber des pleurs de fils blonds, et de la madone située tout près de la porte, une madone, languissante et triste, avec l’enfant sur ses genoux, considérant un prêtre en surplis agenouillé devant elle  ; tout cela délavé, pâli, agonisant, en un vague paysage qui s’effume dans les pierres du mur.

C’était, en quelque sorte, une visite à un cimetière de la peinture des Flandres qu’accomplissait là Durtal ; c’était de la fresque sépulcrale  ; ces êtres ressuscités tout à coup n’avaient pas encore repris leurs sens et ils semblaient surtout las, désolés de revivre et, devant l’exhumation de ces morts, par une association naturelle des idées, le souvenir l’assaillait de ce passage si suggestif, si divinatoire, de saint Fulgence commentant l’évangile de saint Jean sur la résurrection de Lazare et disant très nettement : « Jésus pleura non pas, comme le crurent les juifs, parce que son ami était mort, mais il pleura parce qu’il allait rappeler celui qu’il aimait aux misères de la vie. »

Et le fait est, ce qu’une fois suffit et amplement ! Soupira Durtal qui regagna la chapelle de la vierge où les cierges s’allumaient et il y entendit la messe  ; puis il s’installa dans un coin et s’efforça de se recouvrer, de voir un peu clair en lui-même, de se comprendre.

Ce qui le dominait, à l’heure actuelle, c’était une immense fatigue. Encore qu’elle agisse, virtuellement, par elle-même et par la force de l’intention qu’elle recèle, même lorsqu’en la récitant, on pense à autre chose, la