Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/132

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substance : les distractions dont vous vous plaignez, je les éprouve autant que vous, mais il n’y a à en faire aucun cas  ; cela me paraît, du reste, un mal incurable.

À la bonne heure, au moins ! Ce qu’elle vous liquide un passif d’âme en deux mots et avec cette certitude, qu’il ne peut y avoir, quand elle a parlé, d’erreur.

Quelle femme ! sa règle semble surhumaine et elle est la plus pondérée de toutes. Les machines sous pression divine qu’elle voulut sont munies de soupapes de sûreté ; des récréations distendent l’âme comprimée, permettent de déverser le trop plein, de se détendre ; seulement il lui fallait des caractères enjoués et résolus. Une nonne mélancolique deviendrait, en effet, dans son cloître, une désespérée ou une folle. Comme elle est appelée à prendre à son compte les tentations et les maux des autres, elle peut s’attendre à subir les pires des douleurs, à se débattre même dans les assauts de ces terribles péchés qu’elle attire, telle que la pointe aimantée le tonnerre, pour les résoudre.

Afin d’être en mesure de résister à de pareils chocs, il faut que le corps puisse vraiment sourire, lorsque l’âme est à la torture et que l’âme s’égaie, à son tour, quand le corps souffre. C’est si au-dessus de l’humanité que c’est effrayant, se disait Durtal.

Et pourtant, il y eut plus dur  ; dans un carmel, on est en nombre, on se partage les épreuves, on se soutient, on s’aide  ; il y a aussi des temps d’arrêt dans la lutte, des diversions ; mais il y eut, au Moyen-Age, avant cette époque surtout, l’expiateur et l’expiatrice de la solitude, les ermites volontaires de la nuit, agenouillés