Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/209

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grossière chez nos ancêtres, en Bourgogne surtout. Nous n’avions point en ces temps, honnis par les imbéciles, le bégueulisme. Savez-vous, Madame Bavoil, qu’autrefois, avant la messe de ce jour, l’on célébrait solennellement dans certaines églises la fête de l’âne et, excusez du peu, l’auteur de l’office, paroles et musique, n’était, ni plus, ni moins que mgr Pierre de Corbeil, archevêque de Sens. Mais oui, du treizième au quinzième siècle, le pauvre âne a participé au triomphe du Rédempteur.

— Quand je songe qu’il a servi de monture à Jésus, murmura Mme Bavoil, j’ai envie de l’embrasser sur les naseaux, lorsque je le rencontre.

— Il y eut aussi la fête des fous, reprit M. Lampre, en riant ; les acteurs élisaient un évêque qu’ils intrônisaient en des cérémonies ridicules ; et ce bouffon bénissait dans la basilique, le peuple et présidait à des offices dérisoires, tandis que les paysans, barbouillés de moût et déguisés en bateleurs ou en ribaudes, l’enfumaient avec du cuir de vieille savate, brûlé dans l’encensoir.

— Je ne vois pas ce que de semblables bacchanales pouvaient avoir de religieux, observa Mme Bavoil.

— Mais si ; l’origine de ces parodies était liturgique. L’âne était honoré à cause de l’ânesse qui parla et fut, en quelque sorte, cause, par ses remontrances, que Balaam énonça, devant le roi des moabites, sa célèbre prophétie sur la venue du messie. L’espèce asine, qui fut une des annonciatrices du Christ, l’assista dès qu’il fut né, près de la crèche, et le porta en triomphe, le jour des palmes ; elle avait donc sa place toute marquée dans l’anniversaire de Noël.

Quant à la festivité des fous, elle s’appela de son vrai