Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/265

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et où l’on se sent exalté, projeté hors de soi-même, si loin de la banalité du monde qui vous entoure !

Oui, à certains instants, l’on a envie de bramer l’admiration qui vous étouffe ! Le chef-d’œuvre de l’art ecclésial, c’est peut-être le Pontifical des Vierges. L’on est pris, dès le début, aux moelles ; alors qu’après le verset alleluiatique de la messe, l’évêque ou l’abbé qui officie, s’assied, en haut de l’autel, sur le falstidorium, le siège des prélats, en face du public, et que le maître des cérémonies ou l’assistant entonne cette phrase empruntée à la parabole des Vierges, de saint Matthieu :

« Vierges prudentes, apportez vos lampes, voici l’époux qui arrive ; allez au-devant de Lui. »

Et la vierge, tenant un flambeau allumé, fait un pas et s’agenouille.

Alors le prélat, qui représente le Christ, l’appelle debout, par trois fois, et elle répond en d’admirables antiphones : — « Me voici » — et elle s’avance, à mesure, plus près. L’on dirait d’un oiseau que fascine un bon serpent.

Et, d’un bout à l’autre, l’office se déroule, éloquent, presque massif, ainsi que pendant l’ample et la forte préface ; caressant et comme parfumé par toutes les essences de l’Orient, alors que le chœur des nonnes chante ces phrases du Livre De La Sagesse : « Viens, ma bien-aimée, l’hiver est passé, la tourterelle chante, les fleurs de la vigne embaument » ; délicieux vraiment en cet épisode des fiançailles où la novice acclame le Christ, s’affirme « fiancée à celui que les anges servent, à celui dont les astres du ciel admirent la beauté » ; puis, levant le bras droit en l’air, elle montre son doigt où brille