Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/278

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Carême, comme lui-même est le noviciat de la passion et de la Semaine Sainte, va s’assombrir encore avec les préludes de Pâques, et ce sera enfin fini, murmurait Durtal ; et je n’en serai vraiment pas fâché, car ces jeûnes et ces maigres répétés m’excèdent ; vrai, le brave saint Benoît aurait bien dû, à l’occasion de sa fête, nous permettre d’user d’aliments gras ! Va te faire fiche, l’austère morue va, une fois de plus, sévir, continua-t-il, en emboîtant le pas derrière les moines qui rejoignaient le cloître par la petite porte ouverte dans le fond de l’église. De nombreux prêtres des environs, quelques Dominicains, invités par le père prieur, se promenaient sous les galeries. Il y eut échange de présentations. Durtal cherchait un joint pour aller fumer une cigarette dans le jardin, quand il fut accaparé par le curé. Il l’emmena dans une allée et là, en attendant l’heure du repas, le prêtre lui raconta les cancans du village. Vous connaissez la fille Minot, disait l’abbé, et Durtal secouait la tête ; mais vous connaissez au moins sa sœur qui a épousé Nimoret ? et Durtal secouait encore la tête.

— Ah çà, mais vous ne connaissez donc personne ici ! s’exclama le curé, ahuri et un peu défiant.

— Non, à part la mère Vergognat mon ancienne bonne et le vieux Champeaux que j’emploie pour ratisser les allées du jardin, je ne fréquente personne ; je me borne à faire la navette de ma maison au cloître. Je me ballade parfois dans le jardin et vais à Dijon ou chez M. Lampre et Mlle de Garambois, mais je n’ai aucun rapport avec la population du pays que je sais libidineuse et cupide, ainsi que celle de toutes les campagnes, du reste.