Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/279

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L’Angelus sonna et mit fin à l’entretien ; ils regagnèrent les arcades du cloître. Dom Prieur lava les mains de tous les invités qui se pressaient à la queue leu-leu devant la porte du réfectoire et, au son d’une lecture tombant en ondée monotone sur les tables, le dîner commença.

Il n’y avait point la morue prédite, mais une anguille chapelurée, nageant dans une eau échalotée qui sentait le cuivre, des œufs mollets crevés sur des épinards au sucre, des pommes de terre frites, une crème liquide au caramel, du gruyère et des noix ; et, ce qui fut le comble du luxe, l’on but un doigt de vin excellent récolté dans les monastères de l’Espagne.

Après le retour des grâces achevées à l’église et le café, Durtal, que la discussion des curés sur la politique, la récolte des vins et la démission toujours retardée de Mgr Triaurault n’intéressaient guère, s’échappa avec le père Felletin et s’en fut rejoindre les novices.

Il y avait grand débat lorsqu’ils arrivèrent. Les petits qui n’étaient pas prêtres déploraient que l’abbaye ne contînt pas assez de moines pour pouvoir célébrer sans interruption, du matin au soir et du soir au matin, l’office ; mais comme il eût fallu de fortes équipes pour établir le roulement du « Laus Perennis », il n’était pas possible d’y songer.

Enfin, ça viendra bien, un jour, affirmaient les frères Gèdre et Blanche ; ce jour-là nous pourrons proclamer que l’Ordre Bénédictin est le plus grand Ordre de l’Eglise.

Durtal ne pouvait s’empêcher de sourire de leur emballement et il regardait en dessous les novices prêtres qui ne soufflaient mot.