Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/287

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assaillent sans relâche le ciel soient repoussées par Notre-seigneur, pensaient les novices ; il faut redoubler de zèle et tous se privaient de quelque chose, se levaient plus tôt, se mortifiaient pour détourner le coup.

Depuis quelques semaines déjà, sur l’ordre du p. Abbé, après tierce et avant la grand’messe de neuf heures, tous les religieux chantaient, à genoux, le psaume « Levavi oculos meos in montes », le « Sub Tuum » et la prière à saint Michel ; et le découragement prenait de voir tant de suppliques préservatrices, demeurer vaines.

Durtal qui avait toujours été frappé du caractère démoniaque si marqué de l’affaire Dreyfus et qui ne la considérait que comme un tremplin installé par les juifs et les protestants, pour mieux bondir à la gorge de l’Eglise et l’étrangler, Durtal avait perdu depuis longtemps tout espoir ; et cependant, lorsque la loi fut adoptée par le parlement, il eut le petit tressaut d’un homme qui se trouve subitement en face d’un danger qu’il croyait moins proche.

— Quand on songe, disait-il à Mme Bavoil, que quelques gueux, élus Dieu sait comment, à l’aide de quelles manigances, dans quels bas-fonds, vont crucifier l’épouse ainsi que les juifs ont naguères crucifié l’époux. C’est la passion de l’église qui commence ; rien n’y manque ; tout y est, depuis les clameurs et les blasphèmes des galope-chopines de l’extrême-gauche, jusqu’à cet ancien élève des jésuites, ce Judas qui a nom Trouillot, jusqu’à ce nouveau Pilate qu’est Loubet.

Ah ! celui-là ! — Il allait régulièrement à la messe, en cachette, tous les dimanches, à la Sorbonne, alors