Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/290

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l’Orient à la France ; cette fois, on lui a épargné les coups de bec ; c’étaient des blessures encore trop nobles — et les satrapes de barrière qui nous régissent se sont contentés de le narguer en lui piquant ce qu’on appelle, dans l’argot du peuple « une méduse » ; et, attristé, appréhendant d’envenimer les choses, il a gardé le silence. Que voulez-vous qu’il essaie dorénavant ? Il ne peut plus réagir ; il est trop tard.

— Certes, si quelqu’un est à plaindre, dit Mme Bavoil, c’est bien ce vieillard dont les affectueuses intentions n’ont été récompensées que par des moqueries et des outrages !

— Je me figure cependant, reprit Durtal, que de plus amples douleurs ont encore supplicié la vie de notre père ; il en est, en tout cas, une, qui a dû être pour lui la dernière goutte du calice à boire ; l’on n’en connaît vraiment pas de plus amère.

La Papauté pouvait, devait jouer un rôle magnifique à notre époque, et Léon XIII était certainement prêt à assumer la responsabilité d’un tel geste dans l’histoire ; et des événements qu’il dut subir et que nous ignorons, brisèrent sa volonté, le rejetèrent, épuisé, dans l’ombre.

Alors, en effet, que cette Europe en pourriture, coalisée contre la miséricorde et l’équité, à plat ventre devant la force, regardait, en souriant, les massacres des Arméniens et les brigandages des Anglais au Transvaal, un seul homme pouvait se dresser, imposant par sa majesté et son âge, le pape, et leur dire à tous : je parle au nom du Seigneur que vous crucifiez par votre lâcheté ; vous êtes les adorateurs de la vache à Colas et du veau d’or ; vous êtes les Caïns des peuples. Cela n’eût servi