Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/30

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d’un martyr lorsqu’elle pavoise son chapeau de rouge ou celle d’un confesseur lorsqu’elle arbore les rubans blancs ; malheureusement le nombre des teintes ecclésiales est restreint et elle le déplore assez pour qu’on la raille ; mais tout le monde est d’accord pour admirer sa candide belle humeur et son infatigable bonté.

Vous la verrez et ne serez pas longue à discerner ses deux ardentes toquades : la fine cuisine et les offices ; elle raffole des fastes liturgiques et des petits plats ; sur ces matières, elle en remontrerait au plus érudit des maîtres-queux et au plus studieux des moines.

— Dites donc, notre ami, elle n’est pas banale votre oblate !

— Et ce qu’elle les aime, ses Bénédictins ! Elle eut jadis la vocation d’une moniale et elle fit son noviciat à l’abbaye de Sainte-Cécile de Solesmes ; mais, avant de le terminer, elle tomba malade et dut, sur l’ordre du médecin, l’abandonner ; elle se console maintenant, en vivant dans les environs d’un cloître ; la moniale desséchée a reverdi oblate.

— Mais pour comprendre ainsi la liturgie, elle doit être savante ?

— Elle sait le latin ; elle l’a appris pendant son noviciat à Solesmes et elle l’a, je crois, travaillé depuis ; mais, sortie des traités sur le plain-chant et l’office divin, rien ne l’intéresse ; elle jubile pourtant, ainsi que je vous l’ai raconté, lorsqu’il s’agit d’une savoureuse cuisine ; alors, elle est le cordon bleu conventuel, la mère de blémur du fourneau ; elle peut aussi bien réciter les recettes de manuels culinaires que les antiennes du Psautier.