Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/318

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du modèle connu, adopté par la plupart des enlumineurs du Moyen-Age : le saint esprit, planant sous la forme d’une colombe au-dessus du père et du fils. Ici, le père, couronné ainsi qu’un pape du trirègne, et assis sur le rebord d’une gloire, pareille à une amande d’or, les pieds appuyés sur l’escabeau du monde, tient en son giron Jésus qui tient, lui-même, de la même manière le Paraclet, figuré par la souriante personne d’un gamin blond. Est-ce étrange !

— Et ce qui est non moins étrange aussi, c’est la conservation de ce manuscrit ; les teintes sont en fleur, comme lorsqu’elles naquirent, s’écria Durtal, stupéfié, en effet, par ce coloris clair et jeune, par ces rouges restés intacts, par ces ors inaltérés, par ces ciels bleuâtres demeurés limpides.

— Ah ! ils n’acquéraient point leurs produits chez des marchands et l’aniline n’était pas encore inventée, répondit M. Lampre. Ces gens broyaient, eux-mêmes, leurs couleurs qu’ils extrayaient de certains minéraux, de certaines terres, de certaines plantes.

Nous n’ignorons pas leurs recettes ; ce blanc un peu pâteux que vous voyez là, est du blanc d’os, celui-ci plus léger est de la céruse : ce noir provient du charbon pulvérisé d’un sarment de vigne ; ce bleu est du lapis ; ces jaunes sont de l’herbe à foulon et du safran ; ce rouge vif du minium et ce brun rouge qui correspond à notre ocre est de la terre maigre, de la macra de Naples ; ce vert est tiré de la fleur de l’iris ou de la baie du nerprun ; ce bleu, tournant au violet, n’est pas, ainsi que vous le pourriez croire, obtenu par un mélange de bleu et de rose, il est issu du tournesol et il entrait dans sa