Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/326

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harmonium dont son grand cadet-lagingeole de fils lubréfiait de ses doigts humides les touches.

Et le baron, après s’être nonchalamment passé sur le stérile boulet de son occiput une main qu’allumaient des bagues, a retroussé la brosse à dents de sa moustache militaire et, les yeux au ciel, d’une voix acétique, a débité un étonnant couplet dont je n’ai retenu que la fin.

Jésus sera mon ambroisie

Et mon doux miel,

Je serai sa maison chérie,

Son petit ciel.

Voyez-vous le baron devenu le petit ciel du Christ ! Les paysannes ahuries ouvraient des bouches en valves d’huîtres et notre curé dodelinait du chef et souriait, déférent et heureux.

— Oui, certainement, répliqua M. Lampre, avec sa morgue et ses prétentions vocales, le baron des atours est bien ridicule, mais sorti de là, il faut dire, pour être juste, qu’il est un brave homme qui rend d’appréciables services aux sociétés philanthropiques de Dijon. Son fils est également beaucoup moins godiche qu’il n’en a l’air. C’est un honnête garçon, très travailleur, mais dame ! Il n’a jamais quitté sa province ! — Tenez, bien qu’il soit provincial aussi, celui-là, je vous le recommande, poursuivit-il, en débouchant avec des soins infinis une bouteille. Ce vin est du clos de la commaraine ; il est produit par des vignobles dépendant du finage de Pommard ; nos pères le qualifiaient de « loyal, de vermeil et de marchand ». Il est, dans tous les cas, bouqueté