Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/76

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torchon, cachait un petit lit de fer auprès duquel, sur le coffre d’une machine à coudre, hors d’usage, était posée une cuvette et au-dessous une cruche de grès, calée par un bout de bois, sur le carreau creusé ; mais où l’ingéniosité du père se remarquait, c’était dans une série de détails cocasses. D’une ancienne balance à fil qu’il avait suspendue à une latte de bois sortant du mur, il avait fait un porte-savon ; il mettait un morceau égal sur chaque plateau et il usait alternativement les deux morceaux, un jour l’un, un jour l’autre, pour conserver l’équilibre. La tige fixée dans la pierre de la muraille par un adroit système de pitons et de pointes, était hérissée de clous à crochets auxquels séchaient des serviettes. Aucun espace n’était perdu dans cette cahute ; des planches grimpaient en des étages incohérents sur des traverses ; elles formaient en face des rayons remplis de paquets et de bocaux, des casiers dont aucun ne se ressemblait ; elles tenaient, on ne savait comme, sur des tasseaux rafistolés, se rejoignaient parfois lorsqu’elles n’étaient pas trop éloignées, les unes des autres, par des lames ajoutées de carton. Et c’était dessus un méli-mélo de flacons et de statuettes pieuses ; d’antiques gravures et de modernes images en couleur étaient collées sur la hotte du fourneau, si enfumées que l’on ne distinguait plus les figures ; et des ustensiles baroques, des matras et des cornues, des lampes avariées, des bouteilles en vidange, des mortiers et des bassins, traînaient avec du charbon, sous une couche de poussière, dans tous les coins.

C’est égal, pensait Durtal, lorsque avant de se révéler Bénédictin, le père Miné gérait une pharmacie à Paris,