Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/89

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un cours de botanique médicale et céleste à des moines de rêve, à des saints, au milieu d’un site enchanté, dans une abbaye idéale dont l’image à l’envers court, ridée par la brise, dans le miroir azuré d’un lac.

— Enfin, si cela vous amuse, moi, je veux bien, répartit Mme Bavoil ; en attendant, deux jours encore d’un temps aigre et pareil à celui d’aujourd’hui et le jardin sera complètement flétri.

Ils se promenèrent, à pas lents dans les allées.

— Il nous restera les fleurs d’arrière-saison, les chrysanthèmes, dit Durtal ; puis ces flores inapprivoisées que vous tenez en si piètre estime ont la vie dure, Madame Bavoil ; et il lui montrait les silènes sauvages dont les étoiles blanches semblent écloses dans le goulot d’une bouteille d’un vert d’eau, barrée de raies plus vertes ; des glaïeuls roses et blancs ; des véroniques bleues ; des buissons ardents superbes avec leurs grains vermillon et leurs feuilles sombres ; mais si ces plantes résistaient, d’autres agonisaient ou étaient tout à fait mortes ; les soleils, devenus secs, étaient horribles. Ils dressaient, ainsi qu’après un incendie, des hampes calcinées au bout desquelles pendaient des feuilles noires et des disques de la forme des pommes de douche ; et ces disques brûlés les entraînaient par leur poids, en de mornes saluts, au moindre vent.

— Eh mais, les genièvres sont mûrs ! s’écria Durtal qui se mit à grignoter ces boulettes bleues qui avaient goût de térébenthine et de sucre.

— Attendez au moins que la gelée les ait fripés, dit Mme Bavoil. Elle se tut, puis, après un silence, reprit :