Page:Jaurès - Histoire socialiste, VII.djvu/102

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Le voici, pour le fer en barre : sous l’Empire, la taxe était de 44 francs par 1000 kilos. Les maîtres de forges obtinrent, que, décime compris, la taxe fût de 165 francs, ce qui représentait la moitié de la valeur de la marchandise.

Et toujours, jusqu’au bout, en dépit des dissolutions, des assassinats, des exécutions, des proscriptions, la même œuvre unitaire se continue jusqu’aux journées de juillet. Jamais, à aucune époque, la puissance capitaliste, en dépit de ses antagonismes politiques, ne fut plus maîtresse de la destinée d’une nation. Et jamais aussi n’a plus nettement apparu la vérité historique dont nous voudrions que ces pages s’imprégnassent : la Restauration, mouvement politique, a tout recueilli de l’Empire, sauf le personnel.

Les ouvriers menaient, isolés de toute action, une vie misérable. Dès le début, cependant, la Restauration essaya de les attirer. C’est de cette époque que date la création du machinisme et c’est alors qu’a commencé, quoique faible encore, le groupement d’ouvriers dans les manufactures. Mais ce mouvement fut lent et la grande majorité des ouvriers, surtout au début de la Restauration, était distribuée dans la petite industrie. Le service militaire avait accoutumé aux villes une partie notable de la jeunesse à qui, plus tard, ne pouvait plus plaire la simplicité de la vie paysanne. Aussi des émigrants nombreux vidaient, dès cette époque, les sillons pour venir remplir les ateliers trop étroits. Surtout à Paris, le nombre des ouvriers s’accroissait, et surtout, à chaque développement du machinisme, le nombre des indigents.

Le Gouvernement sentit le besoin de capter les uns et les autres et d’annexer cette force encore dormante. Il fit, pour arriver au but, des efforts qui seraient louables, n’était l’intention égoïste qui les dicta.

Il rendit plus active la distribution de secours à domicile, éleva des hôpitaux. Paris possédait normalement, sur 700 000 habitants, 60 000 indigents, presque tous anciens soldats jetés hors de la caserne par une brutale et imprévoyante mesure, ouvriers sans travail, errant, piétinant sur le pavé. Toutes les mesures prises en faveur de leur misère et comme pour la désarmer la laissaient cependant entière, et dans les années de disette, comme en 1817, où le blé monta de plus de 80 centimes l’hectolitre, ne lui pouvaient apporter qu’un insuffisant remède en dépit des 1 400 000 hectolitres achetés à Odessa.

Pour les ouvriers qui pouvaient s’employer, les institutions de prévoyance furent créées et, en mai 1818, une autorisation royale va autoriser une société de secours mutuels : ce fut la caisse d’épargne et de prévoyance créée par Benjamin Delessert ; on y acceptait un versement minimum d’un franc et on achetait, quand le dépôt le permettait, une rente de 50 francs ; l’intérêt était de 5 % et s’ajoutait chaque mois au capital. De 505 versements donnant, en 1818, un capital de 54 807 francs, la caisse montait, en 1829, à 138 722 versements donnant un capital de 2 678 134 francs. Puis, en 1821, on devait fonder