Page:Jean Charles Houzeau - La terreur blanche au Texas et mon évasion, 1862.djvu/33

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« Dans la ferme où je suis née, ajoutait-elle avec une expression d’amer regret, — pendant que le boucher, fatigué peut-être de frapper, s’arrêtait à considérer la jeune fille, — dans la ferme où je suis née, on ne m’a jamais demandé que mon travail. J’étais la compagne de Mlle Emilie ; elle me confiait toutes ses pensées ; elle me faisait partager tous ses sentiments. C’est elle qui m’a appris à lire, et qui a nourri mon cœur des préceptes de la religion. Elle est chrétienne, elle est pieuse ; ses devoirs ne sont-ils pas aussi les miens ? »

Suppliante ou fière, Amanda ne trouvait dans son nouveau maître qu’une âme farouche et une volonté inflexible. C’était en vain qu’elle cherchait à le toucher, à l’intéresser à son infortune. En vain elle invoquait sinon les raisons de justice, du moins celles d’humanité. Elle s’effrayait, disait-elle, des suites d’une maternité anticipée, dont telle et telle qu’elle citait par leurs noms, avaient péri.

— « Je suis ton maître, interrompit brutalement le boucher, je t’ai louée; je t’ai bien payée à ton possesseur[1], et ce n’est pas maintenant l’instant de m’échapper.»

— « Maître, ajoutait encore la jeune fille en joignant les mains, je réglerai tout dans votre maison, je veillerai sur tout, je vous serai dévouée. Vous verrez si l’on peut compter sur la vigilance et le désintéressement d’Amanda. Vous êtes seul, souvent absent : vous trouverez à votre retour la propreté, l’ordre et l’élégance. Votre bétail s’égare ou languit faute de soins : je serai

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