Page:Jean Paul - Sur l’éducation, 1886, trad. Favre.djvu/11

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ries qui ne sont pas le fruit de leur expérience personnelle, est favorable ou non au libre développement de l’individualité intellectuelle et morale ?

Ces pensées nous préoccupaient, quand un heureux hasard fit tomber dans nos mains une œuvre de Jean-Paul Richter : Levana, ou la Science de l’éducation. Cette œuvre, dont l’originalité est souvent de la bizarrerie, nous semble se prêter difficilement à une interprétation française. Nous avons essayé d’en rendre quelques fragments, qui nous paraissent exprimer avec le plus de force et de clarté la pensée de l’auteur, digne émule de Montaigne dans l’art d’élever les esprits sans les déformer. Nous ne croyons pas utile d’insister sur ce que nul ne conteste, savoir la haute importance donnée par Jean-Paul à la première éducation et aux devoirs des éducateurs appelés par la nature à surveiller la naissance de l’individualité, l’éclosion de l’être qui pense, qui sent et qui veut. Ce qui nous a particulièrement touchée dans son œuvre, c’est le respect profond de l’individualité, la constante préoccupation de défendre la liberté de l’être humain contre toutes les influences qui tendent à le pousser en dehors de sa voie et à lui donner une nature d’emprunt. Voilà les traits caractéristiques de la pédagogie de Jean-Paul. Ce qu’il redoute surtout c’est l’effacement de la personnalité, le nivellement des esprits et des caractères, comprimés et rétrécis par une règle, une mesure uniforme qui ne trouve pas son point d’appui dans la nature même de l’individu.