Page:Jean Paul - Sur l’éducation, 1886, trad. Favre.djvu/23

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qu’ils peuvent faire, c’est d’obtenir parfois une apparente soumission dont ils triomphent, ou de produire de violentes réactions, plus funestes que les excès qu’ils se flattaient de contenir. Les vrais maîtres, qui entendent réellement le bien de leurs élèves, ne se piquent pas d’en obtenir une docilité factice d’un jour ; ils supportent avec indulgence les écarts d'une vigoureuse nature et attendent avec patience le moment où la raison peut faire valoir ses droits. Alors même que cette force vive se tourne contre eux, ils ne s’irritent ni ne se déconcertent, mais ils poursuivent leur œuvre avec sérénité, sachant bien que les années qui augmentent la lumière, diminuent la force, et que rien ne peut restituer à l’âme laAssance d’élan qu’une prudence excessive tend à lui enlever.

Nous croyons qu’il ne peut y avoir excès de force, mais que ce qui nous semble tel n’est qu’un déplacement de force qui produit une lacune sur un autre point. Le rôle du maître est donc de diriger et d’équilibrer les activités, afin que rien ne se perde, que rien ne gêne, mais que tout contribue à l’harmonie. La force morale n’est pas toujours en raison de la force physique : quelquefois même une âme intrépide peut habiter dans un corps frêle ; ce sont là des exceptions. L’expérience prouve que la santé et la vigueur du corps favorisent le développement de la force d’âme ; que la faiblesse physique est souvent une cause de faiblesse intellectuelle et morale ; que les enfants