Page:Joubert - Pensées 1850 t2.djvu/58

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Que de soin pour polir un verre ! Mais on voit clair et on voit loin : image de ces mots de choix. On les place dans la mémoire, et on les y garde chèrement. Ils occupent peu de place devant nos yeux, mais ils en ont une grande dans l’esprit ; l’esprit en fait ses délices, et cette gloire est assez grande, ce sort est assez beau.

Les mots, comme les verres, obscurcissent tout ce qu’ils n’aident pas à mieux voir.

Nous devons reconnaître, pour maîtres des mots, ceux qui savent en abuser, et ceux qui savent en user ; mais ceux-ci sont les rois des langues, et ceux-là en sont les tyrans.

Il faut assortir les phrases et les mots à la voix, et la voix aux lieux. Les mots propres à être ouïs de tous, et les phrases propres à ces mots, sont ridicules, lorsqu’on ne doit parler