Page:Jouffret - De Hugo à Mistral, 1902.djvu/26

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sentiments d’admiration et d’amour. À mesure que les méthodes pédagogiques s’amélioreront, et que les professeurs seront eux-mêmes plus dignes de la tâche qu’ils remplissent, à mesure ce sentiment de rancune et de dégoût qui suit quelquefois les études classiques, disparaîtra pour faire place aux sentiments légitimes que l’écolier doit toujours ressentir pour les grands écrivains. Laissons encore ici la parole à Victor Hugo :


« … Un jour, quand l’homme sera sage,
Quand on n’instruira plus les oiseaux par la cage.
Quand les sociétés difformes sentiront
Dans l’enfant mieux compris se redresser leur front,
Que des libres essors ayant sondé les règles,
On connaîtra la loi de croissance des aigles.
Et que le plein midi rayonnera pour tous.
Savoir étant sublime, apprendre sera doux.
Alors, tout en laissant au sommet des études
Les grands livres latins et grecs, ces solitudes
Où l’éclair gronde, où luit la mer, où l’astre rit,
Et qu’emplissent les vents immenses de l’esprit.
C’est en les pénétrant d’explication tendre.
En les faisant aimer, qu’on les fera comprendre. »


Nous n’avons donc pas à craindre que nos grands poètes soient diminués par le contact de la vie scolaire, sans quoi il faudrait rayer Homère et Virgile de nos programmes. Au contraire, ils recevront ainsi la consécration officielle de leur génie, et deviendront vraiment classiques, au sens étymologique de ce mot. Ce sont les professeurs, et surtout les professeurs des lycées et des gymnases, qui fondent sur des bases solides, plus peut-être encore que les journalistes et les critiques, la gloire des grands écrivains. Car si les journalistes peuvent faire de la réclame autour d’un nom, si les critiques peuvent faire admirer l’ingéniosité de leur propre esprit, en exécutant des variations plus ou