Page:Jourde - Souvenirs d’un membre de la Commune.djvu/68

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taine insiste pour sortir ; il faut chercher à sortir par l’autre passe. »

Nous apprîmes plus tard que depuis six heures du matin le navire, toutes voiles dehors, essayait de franchir la passe de Boulari située à 10 kilomètres de Nouméa au sud ; après deux heures de navigation, nous avions pu faire deux kilomètres. Le vent était complètement tombé. La mer, sans une ride, laissait glisser le navire avec une telle douceur que nous ne pouvions nous rendre compte de notre marche.

Le capitaine, contre l’avis du pilote, déclara qu’il voulait franchir les récifs ce jour-là. La brise fraîchirait certainement vers midi. En pleine mer le vent orienté favorablement lui assurait une prompte traversée.

Le pilote consentit à faire une tentative de sortie par la passe de la Dumbea, située à l’ouest de l’île, et à la même distance de Nouméa que la passe Boulari.

Pour atteindre la passe de la Dumbéa, il fallait revenir sur ses pas, traverser la rade dans toute sa longueur, passer à quelques mètres de Nouméa, laisser à gauche et à droite, à une faible distance, les deux sinistres pénitenciers : l’île Nou et son bagne, la presqu’île Ducos et ses mille déportés.

À onze heures, troisième billet : « Nous longeons en ce moment la presqu’île Ducos. La brise fraîchit. »

Notre angoisse était terrible. Peut-être s’était-on aperçu de notre absence ! Deux heures, au moins, étaient encore nécessaires pour atteindre la haute