Page:Kahn - Symbolistes et Décadents, 1902.djvu/251

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Arthur Rimbaud.

Quand furent publiés, il y a quelque douze ans, les vers et les proses d’Arthur Rimbaud, il parut simple à la critique littéraire de circonscrire un peu le sujet ; il fut de mode de considérer Rimbaud comme uniquement le néfaste auteur du Sonnet des Voyelles. Rimbaud devenait ainsi une sorte d’Arvers, à rebours. Il était l’homme qui avait perpétré le mauvais sonnet, le sonnet fou, le sonnet pervers. Certains, plus éveillés, négligèrent l’œuvre avec une prudence respectueuse et préférèrent butiner des anecdotes. On s’étonna généralement qu’un homme qui avait eu de la facilité eût négligé les belles heures du succès, qu’il eût certainement obtenu, sitôt assagi, ce qui n’eût été évidemment qu’une question de peu d’années d’apprentissage. Pour quelques-uns, les plus futés, il parut certain que, Rimbaud étant l’ami de Verlaine, il était difficile que Verlaine, tout en faisant la part de l’affection, se fût tout à fait trompé sur la valeur d’art de Rimbaud. Donc on plaignait quelques belles facultés perdues dans le désert ; on goûtait, sauf taches, ellipses et gongorismes à contre-poil, Les Effarés et le Bateau Ivre. Et puis, chez des gens même un peu lettrés,