Page:Kipling - Le Livre de la jungle, illustré par de Becque.djvu/107

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— tout à fait comme un homme, déjà. Réveille-toi, Petit Frère ; j’apporte des nouvelles.

— Tout le monde va bien dans la jungle ? demanda Mowgli, en le serrant dans ses bras.

— Tout le monde, sauf les loups qui ont été brûlés par la Fleur Rouge. Maintenant, écoute. Shere Khan est parti chasser au loin jusqu’à ce que son habit repousse, car il est vilainement roussi. Il jure qu’à son retour il couchera tes os dans la Waingunga.

— Nous sommes deux à jurer. Moi aussi j’ai fait une petite promesse. Mais les nouvelles sont toujours bonnes à savoir. Je suis fatigué, ce soir, très fatigué de toutes ces nouveautés, Frère Gris ; mais tiens-moi toujours au courant.

— Tu n’oublieras pas que tu es un loup ? Les hommes ne te le feront pas oublier ? demanda Frère Gris d’une voix inquiète.

— Jamais. Je me rappellerai toujours que je t’aime, toi et tous ceux de notre caverne ; mais je me rappellerai toujours aussi que j’ai été chassé du Clan.

— Et que tu peux être chassé d’un autre clan ! — Les hommes ne sont que des hommes, Petit Frère, et leur bavardage est comme le babil des grenouilles dans la mare. Quand je reviendrai ici je t’attendrai dans les bambous, au bord du pacage.

Pendant les trois mois qui suivirent cette nuit, Mowgli ne passa guère la barrière du village, tant il besognait à apprendre les us et coutumes des hommes. D’abord il eut à porter un pagne autour des reins, ce qui l’ennuya horriblement ; ensuite, il lui fallut savoir ce que c’était que l’argent,