Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/30

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pris eux-mêmes cette dénomination ; elle s’est maintenue en allemand (où Romanus est inconnu) pour désigner les peuples romans pendant le moyen âge, et n’a pas encore tout à fait disparu : elle s’est particulièrement attachée aux deux peuples qui ont gardé le nom de Romani, aux Churwælschen et aux Walachen.

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Sur le nom des habitants de l’empire on fit un nom pour l’empire lui-même. Il était dans l’esprit populaire de substituer une désignation courte et concrète aux termes de imperium Romanum, orbis Romanus. On tira de Romanus le nom Romania, formé par analogie d’après Gallia, Græcia, Britannia, etc. L’avènement de ce nom indique d’une façon frappante le moment où la fusion fut complète entre les peuples si divers soumis par Rome, et où tous, se reconnaissant comme membres d’une seule nation, s’opposèrent en bloc à l’infinie variété des Barbares qui les entouraient. Ce nom était populaire et n’avait pas droit d’entrée dans le style classique ; aussi l’époque où il nous apparaît pour la première fois est-elle évidemment bien postérieure à celle où il dut se former ; les textes qui le donnent l’emploient uniquement par opposition au monde barbare devenu l’objet de toutes les craintes, la menace sans cesse présente à l’esprit.

[Illustration : Rome dominatrice du monde. (Musée du Louvre, nº 102 du Catalogue Clarac).]

La Romania avait à peine pris conscience d’elle-même qu’elle allait être ruinée, au moins dans son existence matérielle. Cette réflexion mélancolique est naturellement suggérée par le passage suivant, où se trouve le plus ancien exemple du mot. C’est au commencement du Ve siècle qu’eut lieu, dans la grotte de Bethléem où vivait saint Jérôme, l’entretien suivant, qui roulait sur le roi goth Ataulf, devenu un allié de l’empire après avoir songé à le détruire complètement : « Ego ipse, dit Paul Orose, virum quemdam Narbonnensem, illustris sub Theodosio militiæ, etiam religiosum prudentemque et gravem, apud Bethlehem oppidum Palæstinæ beatissimo Hieronymo presbytero referentem audivi se familiarissimum Ataulpho apud Nar-