Page:Le Braz - La légende de la mort chez les Bretons vol 2 1902.djvu/316

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée



claire, lumineuse. Çà et là des cadavres flottaient, la face tournée vers le ciel*. Parmi les plus rapprochés du bord, Fantès reconnut deux hommes du pays qui avaient été noyés, un jour de tempête, l'année d’auparavant, sans qu’on sût au juste dans quels parages.-

Une vanne d*acier fermait l’étang. Avec une des clefs, la pauvresse ouvrit cette vanne. L’eau se précipita écumante vers la mer. Les noyés se levèrent comme ressuscites, et Fantès les vit s’éloigner en chantant des cantiques, par le chemin des flots où ils marchaient paisiblement, comme autrefois Jésus.

Quand toute l’eau se fut écoulée, le fond de l’étang apparut à Fantès couvert de pièces d’or. Elle en ramassa autant qu’elle en put porter et en revint à sa maison.

Le lendemain, dès la première heure, elle courut à confesse.

— Que ferai-je de tout cet or ? demanda-t-elle au prêtre, après lui avoir conté son aventure.

— Vous ferez dire des messes pour les âmes qui en ont besoin, répondit le confesseur, et vous distribuerez l’aumône aux vivants *.

(Conté par Marie-Hyacinthe Toulouzan. — Port-Blanc.)

1, Dans an conte irlandais de Cr. Croker, Fairy legends, p. 207, un génie de la mer a recueilli les âmes des noyés au moment où elles s’échappent dans Teau et les garde au sec et à la chaleur dans des pots.

2. L'île du Château commande à l'ouest rentrée du Port-Blanc. On y voit encore les ruines d’anciennes fortifications. Elle est dominée par des masses de rochers qui peuvent compter parmi les