Page:Le Grand Meaulnes.djvu/147

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dépité de n’avoir pu jeter à terre son ennemi, tourna le dos en disant, avec mauvaise humeur :

— Ce sera pour une autre fois !


Jusqu’à midi la classe continua comme à l’approche des vacances, mêlée d’intermèdes amusants et de conversations dont l’écolier-comédien était le centre.

Il expliquait comment, immobilisés par le froid sur la place, ne songeant pas même à organiser des représentations nocturnes où personne ne viendrait, ils avaient décidé que lui-même irait au cours pour se distraire pendant la journée, tandis que son compagnon soignerait les oiseaux des Îles et la chèvre savante. Puis il racontait leurs voyages dans le pays environnant, alors que l’averse tombe sur le mauvais toit de zinc de la voiture et qu’il faut descendre aux côtes pour pousser à la roue. Les élèves du fond quittaient leur table pour venir écouter de plus près. Les moins romanesques profitaient de cette occasion pour se chauffer autour du poêle. Mais bientôt la curiosité les gagnait et ils se rapprochaient du groupe bavard en tendant l’oreille, laissant une main posée sur le couvercle du poêle pour y garder leur place.

— Et de quoi vivez-vous ? demanda M. Seurel, qui suivait tout cela avec sa curiosité un peu puérile de maître d’école et qui posait une foule de questions.