Page:Le Grand Meaulnes.djvu/325

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cachés dans les bosquets, des enfants inconnus nous auraient fait fête, criant : « Vive la mariée ! »… Quelles folies ! n’est-ce pas ?

Meaulnes, interdit, soucieux, l’écoutait. Il retrouvait, dans tout cela, comme l’écho d’une voix déjà entendue. Et il y avait aussi, dans le ton de la jeune fille, lorsqu’elle contait cette histoire, un vague regret.

Mais elle eut peur de l’avoir blessé. Elle se retourna vers lui, avec élan, avec douceur.

— À vous, dit-elle, je veux donner tout ce que j’ai : quelque chose qui ait été pour moi plus précieux que tout… et vous le brûlerez !

Alors, en le regardant fixement, d’un air anxieux, elle sortit de sa poche un petit paquet de lettres qu’elle lui tendit, les lettres de son fiancé.

Ah ! tout de suite, il reconnut la fine écriture. Comment n’y avait-il jamais pensé plus tôt ! C’était l’écriture de Frantz le bohémien, qu’il avait vue jadis sur le billet désespéré laissé dans la chambre du Domaine…

Ils marchaient maintenant sur une petite route étroite entre les pâquerettes et les foins éclairés obliquement par le soleil de cinq heures. Si grande était sa stupeur que Meaulnes ne comprenait pas encore quelle déroute pour lui tout cela signifiait. Il lisait parce qu’elle lui avait demandé de lire. Des phrases enfantines, sentimentales, pathétiques… Celle-ci, dans la dernière lettre :

« … Ah ! vous avez perdu le petit cœur, impar-