Page:Le Roman de Tristan et Iseut, renouvelé par J. Bédier.djvu/109

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parlent les lais de harpe : une muraille d’air l’enclôt de toutes parts ; des arbres fleuris, un sol embaumé ; le héros y vit sans vieillir entre les bras de son amie, et nulle force ennemie ne peut briser la muraille d’air ? »

Déjà, sur les tours de Tintagel, retentissent les trompes des guetteurs qui annoncent l’aube.

« Non, dit Tristan, la muraille d’air est déjà brisée, et ce n’est pas ici le verger merveilleux. Mais, un jour, amie, nous irons ensemble au pays fortuné dont nul ne retourne. Là s’élève un château de marbre blanc ; à chacune de ses mille fenêtres, brille un cierge allumé ; à chacune, un jongleur joue et chante une mélodie sans fin ; le soleil n’y brille pas, et pourtant nul ne regrette sa lumière : c’est l’heureux pays des vivants. »

Mais au sommet des tours de Tintagel, l’aube éclaire les grands blocs alternés de sinople et d’azur.