Page:Le Roman de Tristan et Iseut, renouvelé par J. Bédier.djvu/135

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L’épée ceinte, à bride abattue, Gorvenal s’était échappé de la cité : le roi l’aurait fait brûler en place de son seigneur. Il rejoignit Tristan sur la lande, et Tristan s’écria :

« Maître ! Dieu m’a accordé sa merci. Ah ! chétif, à quoi bon ? Si je n’ai Iseut, rien ne me vaut. Que ne me suis-je plutôt brisé dans ma chute ! J’ai échappé, Iseut, et l’on va te tuer. On la brûle pour moi ; pour elle je mourrai aussi. »

Gorvenal lui dit :

« Beau sire, prenez réconfort, n’écoutez pas la colère. Voyez ce buisson épais, enclos d’un large fossé ; cachons-nous là : les gens passent nombreux sur cette route ; ils nous renseigneront, et, si l’on brûle Iseut, fils, je jure par Dieu, le fils de Marie, de ne jamais coucher sous un toit jusqu’au jour où nous l’aurons vengée.

— Beau maître, je n’ai pas mon épée.

— La voici, je te l’ai apportée.

— Bien, maître ; je ne crains plus rien, fors Dieu.