Page:Le Roman de Tristan et Iseut, renouvelé par J. Bédier.djvu/215

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m’as enlevé la joie de mes yeux et la gaieté de mon cœur ! »

Tristan confia le chien à un jongleur de Galles, sage et rusé, qui le porta de sa part en Cornouailles. Il parvint à Tintagel et le remit secrètement à Brangien. La reine s’en réjouit grandement, donna en récompense dix marcs d’or au jongleur et dit au roi que la reine d’Irlande, sa mère, envoyait ce cher présent. Elle fit ouvrer pour chien, par un orfèvre, une niche précieusement incrustée d’or et de pierreries et, partout où elle allait, le portait avec elle, en souvenir de son ami. Et chaque fois qu’elle le regardait, tristesse, angoisse, regrets s’effaçaient de son cœur.

Elle ne comprit pas d’abord la merveille : si elle trouvait une telle douceur à le contempler, c’était, pensait-elle, parce qu’il lui venait de Tristan ; c’était, sans doute, la pensée de son ami qui endormait ainsi sa peine. Mais un jour elle connut que c’était un sortilège, et que seul le tintement du grelot charmait son cœur.