Page:Le Roman de Tristan et Iseut, renouvelé par J. Bédier.djvu/269

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— Non, car Tristan est beau et le meilleur des chevaliers ; mais cet homme est hideux et contrefait. Maudit soit-il de Dieu ! maudite soit l’heure où il est né, et maudite la nef qui l’apporta, au lieu de le noyer là-dehors, sous les vagues profondes !

— Apaisez-vous, dame, dit Brangien. Vous savez trop bien, aujourd’hui, maudire et excommunier. Où donc avez-vous appris tel métier ? Mais peut-être cet homme serait-il le messager de Tristan ?

— Je ne crois pas, je ne l’ai pas reconnu. Mais allez le trouver, belle amie, parlez-lui, voyez si vous le reconnaîtrez. »

Brangien s’en fut vers la salle où le fou, assis sur un banc, était resté seul. Tristan la reconnut, laissa tomber sa massue et lui dit :

« Brangien, franche Brangien, je vous conjure par Dieu, ayez pitié de moi !

— Vilain fou, quel diable vous a enseigné mon nom ?

— Belle, dès longtemps je l’ai appris ! Par mon chef, qui naguère fut blond, si la