Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/394

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Presque tous ceux qui l’ont approché dans les dernières années de sa vie se rappellent qu’il discutait avec véhémence[1] sur les sujets religieux, philosophiques et politiques. « J’ai été, je suis et je ne puis pas ne pas être républicain » : ainsi débutait une lettre qu’il écrivit à Clovis Hugues. « Au point de vue socialiste, formule celui-ci, Leconte de Lisle dépassait beaucoup Victor Hugo, qui était surtout un chrétien, qui faisait consister tout le socialisme dans la charité et dans l’aumône. La révolte et les aspirations vers la justice sociale apparaissent à maintes reprises dans l’œuvre de Leconte de Lisle et sont plus nombreuses dans son seul Kain que dans tous les chapitres réunis des Misérables[2]. Il s’intéressait sarcastiquement à l’évolution de la Troisième République dontles hommes, financiers et avocats, lui semblaient inférieurs[3]. « Quelle différence entre notre époque et celle de 1793, déclarait-t-il en 1893 à M. Amandra, car je suis un vieux jacobin, moi, et rien ne me fait plus sourire que les attaques contre la Révolution française, le plus admirable fait de l’histoire ! Quand j’entends quelqu’un discuter cette épopée vraiment humaine, j’ai tout de suite une opinion sur le détracteur. Ces grands souvenirs me consolent des tristesses de l’heure présente et de l’abandon momentané des nobles traditions artistiques de la

  1. L. X. de Ricard. M. Barracand notait, à la fin de sa vie, sa fureur anticatholique.
  2. M. Clovis Hugues rapporte aussi cette anecdote. — « Un jour, comme Hugo lui disait : « Je crois en Dieu parce que je le vois. » L. de L., incrédule, arborant son monocle, répondit : Moi, je ne le vois point, où donc est-il ? ».
  3. WS : dans le fac-similé, un appel de note apparaît dans le texte mais la note attendue y est manquante en bas de page.