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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.

De carême-prenant promenant carnaval !
Or, c’est un pénitent, un moine, dans sa robe
Traînante enseveli, voilé d’un capuchon,
Qui, pour se rendre au ciel, ici-bas se dérobe ;
Béat, sur la vertu très à califourchon.
Mais Sabaoth l’inspire : il peste, il jure, il sue ;
Il lance à ses rivaux de superbes défis,
Qu’il appuie à propos d’une lourde massue :
Il est taché de sang et baise un crucifix.

Pour le tiers cavalier, c’est un homme de pierre,
Semblant le Commandeur, horrible et ténébreux ;
Un hyperboréen ; un gnome sans paupière,
Sans prunelle et sans front, qui résonne le creux
Comme un tombeau vidé lorsqu’une arme le frappe.
Il porte à sa main gauche une faux dont l’acier
Pleure à grands flots le sang, puis une chausse-trape
En croupe où se faisande un pendu grimacier,
Laid gibier de gibet ! Enfin pour cimeterre
Se balance à son flanc un énorme hameçon
Embrochant des filets pleins de larves de terre,
Et des vers de charogne à piper le poisson.



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