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NAPOL LE PYRÉNÉEN.


Les Mores ont haché les rois goths à Xérès,
Leurs bataillons fauchés sont là dans les guérets
            Comme des gerbes égrenées ;
L’Arabe, sur les pas de Musa-el-Kévir,
Fait voler son cheval du bleu Guadalquivir
            Jusques aux blanches Pyrénées.

Mais un jour que Musa-el-Kévir a voulu
Traquer, sur leurs sommets, un vieil ours chevelu,
            Grimpant de pelouse en pelouse,
Il monte au pic neigeux du Valier…… ébloui,
Il voit un horizon en fleurs épanoui,
            Où, comme une perle, est Toulouse.

« Fils d’Allah, dégainez vos sabres ! Fils d’Allah,
Montez sur vos chevaux ! La France est au delà.
            Au delà de ces rocs moroses !
L’olive y croît auprès du rouge cerisier,
La France est un jardin fleuri comme un rosier
            Dans la belle saison des roses. »

L’Arabie, en nos champs, des rochers espagnols
S’abattit : le printemps a moins de rossignols
            Et l’été moins d’épis de seigle.
Blonds étaient les chevaux dont le vent soulevait
La crinière argentée, et leur pied grêle avait
            Des poils, comme des plumes d’aigle.

Ces Mores mécréants, ces maudits Sarrasins
Buvaient l’eau de nos puits, et mangeaient nos raisins,
            Et nos figues et nos grenades ;
Suivaient dans les vallons les vierges à l’œil noir,
Et leur parlaient d’amour, à la lune, le soir,
            Et leur faisaient des sérénades.