Page:Lemonnier - Gros, Laurens.djvu/14

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de la forme pure, il pouvait empêcher l’expression des réalités de se perdre dans la vulgarité. Puis les artistes trouvaient dans l’effort que suppose sa doctrine un ressort très vigoureux, dans ses aspirations vers le grand, dans la hauteur où il plaçait son idéal, quelque chose qui correspondait bien un peu à l’émotion nécessaire pour exprimer l’héroïsme de l’époque.

Mais, pour que se réalisât cet accord des sentiments dans le désaccord des formules, il fallait qu’il se rencontrât un artiste qui, ayant reçu quelque chose de l’éducation classique, en eût été ensuite à demi libéré par les circonstances, un artiste de génie, ou au moins d’instinct, qui, emporté par la force de son tempérament, atteignit à l’idéal à force de se pénétrer du réel.

Gros allait exprimer dans quelques-unes de ses œuvres cet art d’une inspiration si puissante et si originale.


II

Jean-Antoine Gros[1] naquit, le 16 mars 1771, à Paris, où son père, un artiste émigré de Toulouse, était venu s’établir. Il manifesta d’assez bonne heure des dispositions


  1. Les limites et le caractère de ce livre ne nous permettent pas d’indiquer les nombreux ouvrages où il est question de Gros. Actuellement les deux livres à consulter sont celui de Delestre : Gros, sa vie et ses ouvrages, 1845 (une seconde édition — illustrée — a paru en 1867), et celui de Tripier-Le Franc : Histoire de la vie et de la mort du baron Gros, le grand peintre, 1880. Ils contiennent l’essentiel pour la bibliographie et pour les œuvres, sans cependant être toujours complets ou bien exacts sur chacun de ces deux points : mais surtout les deux auteurs manquent de