Page:Lemonnier - Gros, Laurens.djvu/18

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chand de tableaux et avait surtout des Flamands, des Hollandais, des Vénitiens, très à la mode à cette époque. Le père de Gros lui-même possédait une assez belle collection, où figuraient également des Flamands, des Hollandais, et où Boucher et Fragonard étaient représentés. Il l’avait, il est vrai, vendue en 1778 (on en a le catalogue imprimé), mais elle montre au milieu de quelle atmosphère artistique le jeune Gros fut élevé. Son éducation, en somme, avait été assez libre, la discipline scolaire pas très forte, et elle cessa à l’âge qui est pour la plupart des esprits celui de la formation décisive. D’autre part Gros, né en 1771, n’allait pas être comme quelques-uns de ses prédécesseurs, Vincent, Suvée, partagé entre l’art auquel Boucher a attaché son nom et la révolution artistique accomplie sous celui de David. Au moment où il sortait à peine de l’enfance, celle-ci triomphait déjà, puisque les Horaces datent de 1784, le Brutus de 1789.

Au début de 1793, Gros se trouvait dans une situation très critique. Outre qu’il était presque sans ressources (son père avait été ruiné comme tant d’autres, et Tripier-Le Franc dit qu’il mourut en 1793 même), il se sentait suspect en ce temps de Terreur. En effet, par sa famille, par ses relations, il avait plutôt des attaches avec le monde de l’ancienne cour. S’il se tenait en dehors de la politique, à un moment où il était aussi périlleux de s’abstenir que d’agir, il paraît certain qu’il ne donnait aucun gage aux idées révolutionnaires, que quelques-uns de ses camarades, Gérard par exemple, avaient affecté