Page:Lemonnier - Gros, Laurens.djvu/58

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passion que la réalité avait toujours quelque chose de déclamatoire. Le génie de Gros convenait admirablement à exprimer l’éloquence théâtrale des hommes et des choses de ce temps. Et il est intéressant de comparer son esquisse à la Distribution des Aigles, où David a rendu avec emphase l’enthousiasme débordant des maréchaux et des grenadiers de l’Empire, au moment des triomphes les plus glorieux.

En somme, pendant les quinze années qu’avait duré la puissance de Napoléon, Gros avait produit trois œuvres de premier ordre : Jaffa, Aboukir, Eylau, et quelques très beaux portraits, qui peuvent être considérés comme des pages d’histoire, parce qu’ils contiennent une part de vérité générale en même temps qu’individuelle. Il avait complètement abandonné les sujets classiques et, plongeant dans les réalités vivantes, il avait, à leur contact, développé des qualités supérieures de coloriste et de dessinateur épris du vrai. Avec David, Girodet, Gérard et Prudhon, il était considéré comme le grand peintre de l’époque. La critique n’avait pas cessé de lui être douce et l’on remarquera combien elle insistait sur les qualités de sa technique.


IV

La chute de l’Empire allait modifier sa situation. Non pas que la Restauration lui ait été défavorable ou qu’il ait été de ceux qui s’isolaient dans le culte des souvenirs