Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/180

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avec ses négations ! Comme il triomphe lestement des hésitations, des incertitudes, des répugnances de ceux qui voudraient encore croire possible la réunion des sentimens ardens, des impressions passionnées, des dons de l’intelligence, de l’intuition poétique, avec un caractère intègre, une vie intacte, une conduite qui ne dément jamais l’idéal poétique !

Comment alors ne pas être affecté de la plus noble des tristesses, toutes les fois qu’on s’aheurte à un fait qui nous montre le poëte désobéissant aux inspirations des muses, ces anges-gardiens du talent, qui lui enseigneraient si bien à faire de sa vie le plus beau de ses poëmes ? Quels désastreux scepticismes, quels regrettables découragemens, quelles douloureuses apostasies, n’entraînent pas après elles les défaillances de l’artiste ? Combien y en a-t-il qui, doutant de la révélation divine, l’ignorant parfois, se rient avec un amer mépris de la philosophie humaine, et ne savent plus à quoi se fier, à qui croire, quand ils ne peuvent plus se fier aux incitations du beau, ni croire au génie !

Et pourtant, elle serait sacrilége la voix qui confondrait ses écarts dans un même anathème, avec les rampemens de la bassesse ou l’impudeur vantarde ! Elle serait sacrilége, car si l’action du poète a parfois menti à son chant, son chant n’a-t-il pas encore mieux renié son action ?… Son œuvre ne peut-elle pas contenir des vertus plus efficaces, que son action n’a de forces malfaisantes ? — Le mal est contagieux, mais le