Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/208

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de pureté, son appréhension du lieu-commun étaient tels, que même dans Don Juan, même dans cet immortel chef-d’œuvre, il découvrait des passages dont nous lui avons entendu regretter la présence. Son culte pour Mozart n’en était pas diminué, mais comme attristé. Il parvenait bien à oublier ce qui lui répugnait, mais se réconcilier avec, lui était impossible. Ne subissait-il pas en ceci les douloureuses conditions de ces supériorités d’instinct, irraisonnées et implacables, dont nulle persuasion, nulle démonstration, nul effort ne parviennent jamais à obtenir l’indulgence, ne fût-ce que celle de l’indifférence, pour des objets d’un spectacle antipathique et d’une, aversion si insurmontable qu’elle est comme une sorte, d’idiosyncrasie ?

Chopin donna à nos essais, à nos luttes d’alors, si remplies encore d’hésitations et d’incertitudes, d’erreurs et d’exagerations, qui rencontraient plus de sages hochant la téte que de contradicteurs glorieux, l’appui d’une rare fermeté de conviction, d’une conduite calme et inébranlable, d’une stabilité de caractère également à l’épreuve des lassitudes et des leurres, en même temps que l’auxiliaire efficace qu’apporte à une cause le mérite des ouvrages qu’elle peut revendiquer. Chopin accompagna ses hardiesses de tant de charme, de mesure et de savoir, qu’il fut justifié d’avoir eu confiance en son seul génie par la prompte admiration qu’il inspira. Les solides études qu’il avait faites, les habitudes réfléchies de sa jeunesse, le culte