Page:Liszt - Lohengrin et Tannhäuser, 1851.djvu/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
175

ciers et de s’élever dans les régions d’un symbolisme encore inaffronté. C’est une tâche osée que de vouloir monter jusqu’aux grandes hauteurs, sur les vacillants échelons de l’allégorie. Wagner s’y est maintenu en suivant avec une extrême habileté le fil, la ligne, le pont étroit que la Poésie peut jeter entre l’action et le mythe. Il a donné assez de vie à ses personnages pour les dramatiser, et a laissé flotter assez de vague sur leurs contours, pour que chaque intelligence compréhensive y pût dessiner ses propres traits. Dans cette fiction si ancienne, il a trouvé le moyen de toucher d’une manière neuve au lien subtil qui existe entre le désordre des sentimens et les appétits de la chair, et il a eu l’inappréciable avantage de pouvoir se soustraire à la nécessité où l’on avait été jusque là, chaque fois qu’on avait essayé de présenter un type des mêmes passions, de prendre la multiplicité des amours, comme expression de la puissance et des entraînemens d’une insatiable volupté.

Dans son poëme, la Volupté nous apparaît, non plus sous les images qui servent de prétexte à la passion, mais comme la Passion incarnée, étant à elle-même sa propre fin et son propre objet, et nous sommes délivrés de ce cortége obligé de noms disparates, de cette liste des mille e tre, qui dérobe dans son vulgarisme d’insipide fatuité, de stupide gloriole, et de