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bigarrure anecdotique, ce qu’il peut y avoir de grand, de fier, de mélancolique et de sublime, en cette aspiration impatiente vers une félicité immédiate, dont sont oxydées et consumées certaines organisations, riches et douées, que personne ne s’aviserait de confondre avec des débauchés ordinaires. Grâce à cette vivification de la beauté allégorique de Vénus, nous sommes débarrassés des détails communs, des couleurs locales, des traits de mœurs, de ce bagage de faits microscopiques, qui, toutes les fois qu’une figure éclairée de ces funestes feux a été retracée sur la scène, dans le poëme ou dans le roman, ont inévitablement encombré le tableau, et en ont étouffé l’impression poétique en multipliant les effets pittoresques. Il est certain que ces détails, ces faits variés, ces anecdotes barriolées, cette couleur locale, ces traits de mœurs servent à entretenir les égaudissemens que cherchent à provoquer les spirituels et amusans conteurs. Mais ils dépouillent indignement de leur caractère sinistre les plaisirs douloureux, recélant tant d’angoisses dans leurs néfastes joies, de ceux qui en s’y abandonnant ne perdent point leurs titres à notre intérêt ; et aussi longtemps que leurs désirs vont au delà de leurs jouissances, aussi longtemps que la souffrance demeure la secrète compagne de leurs délires, aussi longtemps qu’ils sont éperonnés dans la poursuite d’une satisfaction insaisissable, parle pressentiment d’un idéal introuvé,