Page:Loti - Aziyadé.djvu/254

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l’existence britannique, les amis fâcheux, les ingrats, je laisse tout cela sans regrets et sans remords. Je m’attache à ce pays dans un instant de crise suprême ; au printemps, la guerre décidera de son sort et du mien. Je serai le yuzbâchi Arif ; aussi souvent que dans la marine de Sa Majesté, j’aurai des congés pour aller voir là-bas ceux que j’aime, pour aller m’asseoir encore au foyer, à Brightbury sous les vieux tilleuls.

Mon Dieu, oui !… pourquoi pas, yuzbâchi, turc pour de bon, et rester auprès d’elle…

Et je songeai à cet instant d’ivresse : rentrer à Eyoub, un beau jour, costumé en yuzbâchi, en lui annonçant que je ne m’en vais plus.

Au bout d’une heure, ma décision était prise et irrévocable : partir et l’abandonner me déchirait le cœur. Je me fis de nouveau introduire chez le pacha, pour lui donner le oui solennel qui devait me lier pour jamais à la Turquie, et le prier de faire, le soir même, présenter ma requête au sultan.