Page:Loti - Aziyadé.djvu/300

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parle, ayant un jour eu l’idée de me promener sur ma maison, je me suis vu passer dans mon quartier pour un garçon excentrique.

» Tout le monde est à l’uniforme, paletot gris, chapeau ou casquette, et c’est pis qu’à Péra. Tout est prévu, réglé, numéroté ; il y a des lois surtout et des règlements pour tout le monde, si bien que le dernier des cuistres, marchand de bonneterie ou garçon coiffeur, a les mêmes droits à vivre qu’un garçon intelligent et déterminé, comme toi ou moi par exemple.

» Enfin, croirais-tu, mon cher Achmedim, que, pour le quart de ce que nous faisons journellement à Stamboul, on aurait dans mon pays des pourparlers d’une heure avec le commissaire de police !

Achmet comprit très bien cet aperçu de civilisation occidentale, et resta un instant rêveur.

— Pourquoi, dit-il, après la guerre, n’amènerais-tu pas ta famille en Turquie d’Asie, Loti ?


— Loti, dit Achmet, je veux que tu emportes ce chapelet qui me vient de mon père Ibrahim, et promets-moi qu’il ne te quittera jamais. Je sais bien, reprit-il en pleurant, que je ne te reverrai