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soir : une heure, deux heures se passent, les minutes se traînent et sont longues comme des nuits.

À onze heures, un léger bruit d’avirons sur la mer calme ; un point lointain s’approche en glissant comme une ombre. C’est la barque de Samuel. Les factionnaires le couchent en joue et le hèlent. Samuel ne répond rien, et cependant les fusils s’abaissent ; – les factionnaires ont une consigne secrète qui concerne lui seul, et le voilà le long du bord.

On lui remet pour moi des filets, et différents ustensiles de pêche ; les apparences sont sauvées ainsi, et je saute dans la barque, qui s’éloigne ; j’enlève le manteau qui couvrait mon costume turc et la transformation est faite. Ma veste dorée brille légèrement dans l’obscurité, la brise est molle et tiède, et Samuel rame sans bruit dans la direction de la terre.

Une petite barque est là qui stationne. – Elle contient une vieille négresse hideuse enveloppée d’un drap bleu, un vieux domestique albanais armé jusqu’aux dents, au costume pittoresque ; et puis une femme, tellement voilée qu’on ne voit plus rien d’elle-même qu’une informe masse blanche.