Page:Loti - Aziyadé.djvu/47

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ce sommeil accablant contre lequel il n’y a pas de résistance possible ; — et la barque s’en alla en dérive.

Une voix rauque et germanique nous éveilla au bout d’une heure ; la voix criait quelque chose en allemand dans le genre de ceci : « Ohé du canot ! »

Nous étions tombés sur les cuirassés allemands, et nous nous éloignâmes à force de rames ; les fusils des hommes de garde nous tenaient en joue. Il était quatre heures ; l’aube, incertaine encore, éclairait la masse blanche de Salonique, les masses noires des navires de guerre ; je rentrai à bord comme un voleur, assez heureux pour être inaperçu.


XXII

La nuit d’après (du 28 au 29), je rêvai que je quittais brusquement Salonique et Aziyadé. Nous voulions courir, Samuel et moi, dans le sentier du village turc où elle demeure, pour au moins lui dire adieu ; l’inertie des rêves arrêtait notre course ; l’heure passait et la corvette larguait ses voiles.